La ludopédagogie est une méthode éducative qui utilise le jeu pour faciliter l’apprentissage. Fondée sur des principes des neurosciences, elle s’appuie sur des mécanismes ludiques variés afin de rendre les formations plus engageantes et interactives.
Souvent mise en pratique avec les jeunes publics, la ludopédagogie gagne en popularité dans le monde adulte pour son efficacité à engager, motiver, et ancrer durablement les connaissances. Dans cet article, nous vous présentons les ingrédients essentiels pour intégrer cette méthode de manière optimale dans vos formations et maximiser leur impact pédagogique.
- 1 Ludopédagogie, de quoi parle-t-on ?
- 2 S’inspirer des 4 piliers d’apprentissage de Stanislas Dehaene
- 3 Supprimer la notion de danger
- 4 Tirer parti de la diversité
- 5 Générer de la motivation intrinsèque
- 6 Concrétiser l’abstrait
- 7 Proposer une progression adaptée aux apprenants
- 8 Générer des émotions
- 9 Devenir des facilitateurs d’apprentissage plutôt que des formateurs
- 10 Ressources et outils pour créer vos outils ludopédagogiques
- 11 En conclusion : apprenez, créez et innovez par le jeu
- 12 Formation à la ludopédagogie
- 13 Inscription Newsletter
Ludopédagogie, de quoi parle-t-on ?
Le terme pédagogie vient du grec paidos, signifiant « enfant », et agein, qui veut dire « conduire » ou « mener ». Historiquement, la pédagogie se rapportait donc à l’art de guider les enfants dans leur apprentissage. Pour désigner l’enseignement des adultes, on utilise aujourd’hui le terme andragogie, formé à partir de andros, qui signifie « homme » et, par extension, « adulte ».
Cependant, le mot pédagogie a progressivement pris un sens plus large, désignant l’art de transmettre des savoirs pour tous les âges. Dans ce contexte, la ludopédagogie, ou pédagogie par le jeu (du latin ludo “jouer”), est devenue un terme couramment utilisé pour toutes les formes d’apprentissage par le jeu, que ce soit pour des enfants ou des adultes.
L’idée d’utiliser le jeu comme support d’apprentissage n’est pas nouvelle : dès le XVe siècle, des jeux de cartes éducatifs apparaissent en France, suivis au XVIe siècle par le célèbre jeu de l’oie, facilement adaptable à la découverte de nombreux sujets. Le XIXe siècle marque un véritable engouement pour les jeux éducatifs, un succès qui atteindra un point culminant à partir des années 1970 avec le développement de jeux vidéos éducatifs.
Alors, pourquoi le jeu est-il un vecteur si efficace pour l’apprentissage ? Pour le comprendre, nous avons analysé son impact à travers divers exemples. Découvrez ici les 8 ingrédients essentiels dans vos supports ludiques pédagogiques.
S’inspirer des 4 piliers d’apprentissage de Stanislas Dehaene
L’ATTENTION
Une des clés pour optimiser l’apprentissage est de capter et maintenir l’attention de l’apprenant, un prérequis pour l’encodage efficace de l’information dans la mémoire à long terme. L’attention est en effet le premier filtre que doit traverser l’information pour être mémorisée. Les recherches montrent que le cerveau est particulièrement réceptif aux stimuli qui sont nouveaux, inattendus, ou qui ont un lien émotionnel fort. C’est ici que la ludopédagogie entre en jeu, en fournissant des stimuli engageants qui captent l’attention des apprenants.
La question à se poser : Est-ce que le jeu contient des éléments dynamiques ou interactifs pour capter et maintenir l’attention des apprenants ?
Exemples :
- Des visuels colorés et faciles à appréhender qui apparaissent au fur et à mesure de l’expérience ludique.
- Des mécanismes qui permettent la mise en mouvement des apprenants
- Le jeu des patterns
L’ENGAGEMENT ACTIF
Dehaene explique que l’apprentissage est plus efficace lorsque les participants sont activement impliqués dans le processus. Cela stimule la production de dopamine, un neurotransmetteur lié à la motivation et au plaisir. Cette libération de dopamine lors d’une activité ludique crée un sentiment de satisfaction et de récompense qui renforce l’engagement de l’apprenant, rendant l’expérience d’apprentissage non seulement plus agréable mais aussi plus efficace.
La question à se poser : Les apprenants sont-ils amenés à agir, manipuler ou interagir directement dans le jeu pour participer activement à leur apprentissage ?
Exemple :
LE RETOUR SUR ERREUR
Le cerveau apprend principalement par essais et erreurs, en recevant des feedbacks sur ses tentatives. Les jeux sont idéaux pour cela, offrant des retours immédiats grâce à des règles claires qui définissent les conditions de réussite ou d’échec, permettant ainsi aux participants de corriger rapidement leurs erreurs et de s’ajuster.
La question à se poser : Le jeu permet-il aux apprenants de comprendre et corriger leurs erreurs de manière constructive et sans jugement ?
Exemple :
LA CONSOLIDATION
La répétition et la pratique sont cruciales pour ancrer durablement les connaissances dans la mémoire à long terme. Les jeux favorisent cette consolidation par la répétition ludique et progressive des concepts. Par exemple, les niveaux de difficulté croissante dans un jeu permettent aux participants de pratiquer les mêmes compétences de différentes manières et dans des contextes variés, renforçant ainsi leur compréhension et leur maîtrise. Cet ancrage peut également se faire sous forme de quiz ou d’équivalent.
La question à se poser : Les concepts clés sont-ils revus de manière répétée dans le jeu pour favoriser la mémorisation à long terme ?
exemple :
- On s’la raconte : grâce au un système de manches
Supprimer la notion de danger
Quand on joue, on se sent en sécurité grâce à un cadre défini et un espace-temps spécifique, sans conséquences sur la « vraie » vie. Des règles claires sont fixées, et, surtout, l’erreur est permise. Il est prouvé que le stress freine la création de nouveaux neurones. En choisissant le jeu pour aborder des sujets complexes, plutôt qu’une approche magistrale, on réduit le stress des participants, ce qui favorise la formation de nouveaux neurones. Bonne nouvelle, non ?
Les questions à se poser :
- Cadre sécurisé : Les règles du jeu sont-elles clairement établies pour créer un cadre où les participants se sentent en sécurité ?
- Autorisation de l’erreur : Est-il explicitement permis aux participants de faire des erreurs sans conséquence, dans un climat bienveillant ?
- Réduction du stress : Les mécaniques de jeu sont-elles conçues pour limiter le stress et favoriser un environnement détendu, propice à l’apprentissage ?
exemple :
Contre-exemple :
- La mécanique de l’escape game : attention elle induit beaucoup de stress lié à la contrainte de temps. Est-ce la meilleure façon d’ancrer un apprentissage ? A challenger 😉
Tirer parti de la diversité
Nous avons tous des façons différentes d’apprendre. En proposant des modalités variées, le jeu permet de s’adapter aux préférences d’apprentissage de chacun et de mobiliser tous les sens pour un ancrage plus profond des concepts clés.
Les questions à se poser :
- Modalités variées : Est-ce que le jeu propose des activités (visuelles, auditives, kinesthésiques, etc.) pour s’adapter aux différents styles d’apprentissage ?
- Accessibilité sensorielle : Le jeu sollicite-t-il plusieurs sens pour permettre un ancrage plus profond des concepts ?
- Personnalisation des expériences : Les joueurs ont-ils la possibilité de choisir parmi plusieurs approches ou stratégies pour progresser dans le jeu ?
exemple :
- Cranium black : modalités variées avec du quiz, du “chant”, de la manipulation de pâte à modeler, du dessin, etc.
Générer de la motivation intrinsèque
Le jeu donne envie aux apprenants de participer à l’activité pour le plaisir même qu’elle offre plutôt que pour un critère extérieur (motivation extrinsèque).
Les questions à se poser :
- Satisfaction de jouer : Le jeu est-il conçu pour être engageant en lui-même, c’est-à-dire, les participants ont-ils envie de jouer pour le plaisir qu’il procure, et non pour une récompense externe ?
- Défi adapté : Le niveau de difficulté est-il équilibré pour susciter l’envie de progresser sans être décourageant ?
- Autonomie : Les apprenants ont-ils un degré d’autonomie dans leurs choix de jeu, favorisant ainsi leur motivation intrinsèque ?
exemples :
- Le visuel est très important dans une formation : il invite à entrer dans un univers et à se laisser porter par le jeu (exemple ci-dessous avec la formation Facilitation city)
- Mettre des variantes du jeu en mode normal ou expert pour s’adapter au niveau des participants
Concrétiser l’abstrait
Le jeu offre un espace métaphorique qui permet de représenter des concepts ou des situations abstraites de façon plus visuelle, manipulable et accessible.
Les questions à se poser :
- Métaphore visuelle : Est-ce que des concepts abstraits sont représentés de manière visuelle ou manipulable pour en faciliter la compréhension ?
- Interaction avec les concepts : Le jeu permet-il aux apprenants de manipuler ou d’interagir concrètement avec des idées abstraites pour mieux les assimiler ?
- Simplicité et clarté : La représentation des concepts dans le jeu est-elle claire et compréhensible pour éviter toute confusion ?
exemple : les jeux de simulation
- Monopoly pour parler du principe de possession et de gestion
- Docteur Maboul pour travailler la dextérité et la précision
Proposer une progression adaptée aux apprenants
Grâce à des systèmes de niveaux ou de manches, les apprenants peuvent renforcer leurs compétences avant de passer à l’étape suivante.
Les questions à se poser :
- Niveaux de difficulté : Le jeu propose-t-il des niveaux ou étapes progressifs qui permettent aux apprenants de renforcer leurs compétences avant de passer à l’étape suivante ?
- Adaptation au rythme : Le rythme de progression peut-il être ajusté en fonction des besoins et du niveau des apprenants ?
- Feedback progressif : Des retours (scores, indicateurs, etc.) sont-ils fournis pour permettre aux apprenants de mesurer leur progression tout au long du jeu ?
exemple :
- Loony Quest, un jeu de plateau qui se joue comme un jeu vidéo (voir photo ci-dessous du site Board game)
Générer des émotions
Le jeu suscite des émotions positives et marquantes, renforçant ainsi la mémorisation des apprentissages. En effet, les émotions jouent un rôle clé dans le processus de mémorisation, car elles activent l’amygdale, une région du cerveau qui influence la consolidation des souvenirs.
Les questions à se poser :
- Émotions positives : Le jeu intègre-t-il des éléments qui suscitent des émotions positives (ex. fierté, amusement) chez les participants ?
- Immersion émotionnelle : L’histoire, les personnages ou le contexte du jeu créent-ils une immersion qui favorise une connexion émotionnelle ?
- Impact sur la mémorisation : Les émotions générées par le jeu aident-elles à ancrer les apprentissages dans la mémoire des participants, selon les retours d’expérience ou évaluations ?
Inspirations autour des émotions :
- Maison des émotions ou les cartes émotions, pour identifier comment nous nous sentons
- Facilitation city : un parcours immersif dans une ville où l’on passe de quartier en quartier (où la sensorialité est valorisée par de petites attentions : le café servi lors du passage au café de l’Empathie, ou encore une playlist dédiée à chaque quartier avec des bruits d’ambiances)
Devenir des facilitateurs d’apprentissage plutôt que des formateurs
À travers la ludopédagogie le formateur devient un guide de l’apprentissage. Il facilite l’activité mais le savoir vient des participants qui découvrent le contenu via le jeu. La phase de débrief notamment est essentielle pour capter leurs ressentis et découvertes des apprenants.
Les questions à se poser :
- Autonomie des participants : Les apprenants ont-ils la possibilité de découvrir par eux-mêmes le contenu via le jeu, plutôt que de recevoir des connaissances de manière magistrale ?
- Phase de débriefing : Une phase de débrief est-elle prévue après le jeu pour permettre aux participants de partager leurs ressentis, de discuter de leurs découvertes et de consolider leur compréhension ?
- Écoute active : Le formateur encourage-t-il les apprenants à exprimer leurs expériences et réflexions, en valorisant leurs découvertes personnelles ?
exemple :
Ressources et outils pour créer vos outils ludopédagogiques
Lors de la conception d’un support ludopédagogique, il est parfois difficile de démarrer d’une page blanche. Voici une liste de ressources qui peuvent vous débloquer et vous aider à trouver les mécaniques adaptées à vos objectifs pédagogiques :
- Gamificartes : un jeu de cartes créé par Fidbak et basé sur les 9 leviers d’engagement pour créer une expérience gamifiée adaptée à chaque public.
- Mécanicartes : ces cartes créées par Prismatik offrent un choix de mécaniques de jeu en fonction des objectifs pédagogiques.
- Ludovortex : Des cartes très complètes qui présentent les mécaniques de jeu de façon exhaustive mais pas seulement puisqu’il est également question de compétences, de débriefing, de matériel, etc.
En conclusion : apprenez, créez et innovez par le jeu
Chez YA+K, nous croyons fermement au pouvoir du jeu comme vecteur d’engagement et de découverte.
Pour en savoir plus, découvrez notre épisode de podcast “Innover par le jeu : les clés pour réinventer l’engagement collectif” et explorez nos ressources en conception ludopédagogique. Vous êtes prêts à franchir le pas ? Suivez notre recette pour créer des outils de formation qui captiveront et enrichiront vos apprenants.
Formation à la ludopédagogie
Vous souhaitez transformer votre formation ou atelier et engagez vos participants grace à la ludopédagogie ? Nous avons conçu une formation-action de 2 jours pour vous transmettre des mécaniques de jeux et vous accompagner dans la conception de votre propre prototype d’outil ludique.